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On part en vadrouille !

Lorsque je ne suis pas en voyage, soit je prépare le suivant, soit je raconte le précédent...

Angkor what ?

Bon, pendant que toi, tu participes à l’émeute pour acheter un pot de Nutella en promo à l’Intermarché du coin, et bien nous, nous sommes à l’autre bout de la planète où l’avenir appartient à ceux qui se lavent sous les aisselles vraiment tôt ! Il est en effet cinq heures du mat’, timing parfait d’un réveil en vacances pour être sûr de ne pas être importuné par les coqs, comme a coutume de le dire mieux que moi Sandrine. Euh, non, je blague... Par contre, oui mon bon monsieur, oui ma bonne dame, Sandrine est déjà prête, lavée, coiffée, et tout et tout… Et pour le prix d’une, j’en ai même deux de plus car les filles aussi ! Oui, comme tu dis, il a fallu leur agiter une sacrée grosse carotte devant les yeux pour les motiver ! Non, ce n’est pas simplement pour éviter les grosses chaleurs. Ce n’est pas non plus pour attraper un vol. C’est pour assister en direct live à la naissance du soleil du jour face à un des spots les plus emblématiques au monde. Le temple d’Angkor Vat, rien que ça ! Je m’en pourlèche les babines d’avance et emmène avec moi toute ma batterie de superlatifs pour te retranscrire le truc à ma façon.

 

Notre petite camionnette est à l’heure au speed-dating que je lui ai fixé ; heure où il fait encore aussi noir que dans le ventre d’une huitre. Fait marrant… ou pas, Sandrine se rend compte une fois sur la route que l’exploit qu’elle a douloureusement accompli de se lever aussi tôt ce matin n’a en définitive rien d’exceptionnel ; une file ininterrompue de phares de tuk-tuk nous précédant et nous suivant sur la route. On se croirait sur le périph’ parisien à une heure de pointe ! Et une fois débarqués, mais qu’est-ce que c’est qu’ce binz ? Même sensation de foule puisque nous surfons maintenant sur une vague humaine qui nous emmène en mode automatique au meilleur emplacement pour le spectacle, c’est-à-dire derrière un petit plan d’eau à gauche du temple dont on ne devine pour l’instant que la silhouette en tâtonnant un peu des yeux. Bon, le site n’étant pas extensible, ça joue un peu des coudes pour kicoralaplubelplace pour son appareil-photo. Si la journée s’était limitée à ça, j’aurais d’ailleurs pu lui donner le titre « Sept cents millions de chinois et nous et nous et nous ! » car comme tu t’en doutes, les chinois trustent les meilleures places avec leurs trépieds. Et qu’est-ce que ça fait, plein de chinois ensemble en un même lieu ? Et bien ça parle fort ! « Fermez-la, un peu, juste pour voir ?... Ah oui, c’est bien mieux ! Merci ! » Bon, rien d’autre à faire que de sucer les nénuphars… Donc en attendant, ben on attend…

 

Il se tient là depuis près de neuf siècles. Il a vu le monde évoluer, se transformer. Il a survécu aux guerres, aux tempêtes, aux tremblements de terre, au clip du Gangnam Style, aux ébats de Loana dans la piscine du loft, à notre deuxième étoile,… Il a vu débarquer depuis quelques années le tourisme de masse. Les chinois. Beaucoup de chinois… Et là, ça y est, rien que pour moi, le soleil me fait l’honneur de darder sur lui ses premiers rayons du jour afin de me faire jouir d’une vue magique… « Magique ? Carrément ? » Ben oui, et c’est Sandrine qui le dit ! C’est que c’est garanti cent pour cent pur kiffe contrôlé par un huissier de justice ! On fait abstraction de tous les lève-tôt qui nous entourent et on savoure ce moment dont on se souviendra à coup sûr toute notre vie… Et pourtant, je suis certain que je ne réalise pas encore. C’est une fois rentré en France que je me dirai deux choses : « Ça y est, faut que j’arrête de raconter des conneries, on me comprend ici ! » et « Put…, je l’ai fait ! Le lever du jour sur Angkor Vat ! »

Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?

Et la lumière fut ! Du coup, tous les chinois se ruent sans réfléchir sur Angkor Vat comme des moustiques sur une lampe ultraviolet. « Vous allez tous à Angkor Vat ? Il m’en est fort aise… Et bien restez-y maintenant !... Et si le gardien du temple pouvait fermer à double-tour toutes les portes une fois tout ce petit monde à l’intérieur, ça m’arrangerait ! » En tout cas, ça nous laisserait suffisamment de temps pour visiter sereinement le Bayon où nous nous dirigeons maintenant. Et mon plan diabolique fonctionne puisqu’en arrivant au Bayon, nous y sommes pratiquement seuls. Tu sais le Bayon, c’est ce temple « montagne magique » dans lequel on trouve une forêt de têtes sculptées gigantesques trônant au sommet de chacune des tours et regardant dans la direction des quatre régions de l’empire khmère… En tout, cinquante-quatre tours pour être précis, avec quatre visages sur chacune d’elles exprimant les quatre vertus de Bouddha : La sympathie, la pitié, l’humeur égale et l’égalité. Allez, j’espère que tu as bien lu l’énoncé du problème et qu’un peu de calcul mental ne te rebute pas : Alors, combien de visages compte le Bayon ?

Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?

Et surtout, la question qui te brûle les lèvres : Qui ces visages représentent-t-ils, vindedious ? Bon, je ne vais pas te faire un cours magistral ou même réécrire bêtement ce qu’il y a dans les livres d’histoire, mais le dénommé Lokeçvara est en gros l’autre nom d’Avalokiteçvara. Ben oui, tu sais, c’est cet être très sage qui devint après moultes aventures Bouddha, et qui fit le choix de revenir parmi le commun des mortels, juste pour guider les différents peuples vers le progrès et l’éveil. Tu suis toujours ? Bon, ce n’est qu’un rapide résumé et le puriste que tu es peut-être me pardonnera mes rapides raccourcis. En tout cas, tout ça pour te dire que tous ces visages sont censés représenter Bouddha et le moins que l’on puisse dire, c’est que les khmères de l’époque étaient plutôt doués du burin ! Car on a vraiment l’impression de parcourir ce temple en étant espionnés par ces deux-cent seize paires d’yeux. Ça, ce n’est malheureusement que jusqu’au moment où le gardien d’Angkor Vat n’a pas eu d’autre choix que de délivrer tous les chinois. A l’abordage !!! Pas facile de ne pas faire de bruit quand on est chinois… Ou plutôt chinois cantonais ! On passe d’un moment de zénitude langoureusement relaxante à la grande parade de Disneyland agrémentée de ses K-way fluos, parapluies, perches à selfie et autres crocs chaussettes… T’es-tu déjà fait marcher dessus par une tribu de crocs chaussettes ? Moi, si ! Donc, de Paris ou d’ailleurs, si tu me suis, on prendra le meilleur, tout est permis, destination ailleurs ! Merci Yannick !

Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?

Et notre ailleurs, c’est le Baphuon, temple pyramidal situé juste à côté. Sauf qu’ici, les armes blanches, les épaules nues, les shorts et les petites filles prénommées Sasha restent en bas ! Et oui, les escaliers étant tellement raides pour y monter, les enfants de moins de douze ans ne peuvent y accéder. Bizarrement, au jeu du chou-fleur truqué, c’est Sandrine qui est désignée pour rester à quai avec notre grenouille. On monte donc rapidement, on bénéficie de la belle vue dont on dispose d’en haut, on fait le tour de ce temple et on reconstitue notre groupe pour aller maintenant longer la Terrasse des éléphants. Du haut de cette terrasse, on peut très bien imaginer la scène du roi Jayavarman VII, torse bombé, admirant le défilé de son armée rentrant victorieuse d’une guerre lointaine. Hommes en armures à dos d’éléphants, centurions équipés de lances et boucliers, cortège de tigres tenus en laisse, flopée de singes espiègles jouant sur les toits des temples,… On s’y croirait, non ?

Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?

Oyé oyé, l’organisateur déclare que la suite du programme va maintenant nous emmener vers les temples Phimeanakas et Preah Palilay avant de finaliser notre visite par Angkor Vat. « Deux nouveaux temples, du jambon d’Ardennes et un verre de vin, ne cherche pas plus loin, voilà la recette du bonheur ! » Voilà surtout le genre de réaction que mes filles… n’ont pas, chaque être humain ayant sa façon de faire cuire des pâtes… Car si je traduis ce que j’entraperçois dans leurs yeux, c’est plutôt « Papa, si tu me forces à visiter un autre temple, et bien je retiens ma respiration jusqu’à ce que tu arrêtes de me forcer de visiter un autre temple... » Grrrrr… Les enfants sont nos amis, il faut les aimer aussi... Craignant une mutinerie sexuellement transmissible, je n’ai d’autre choix que de déclarer officiellement Angkor Vat comme le dernier temple de notre vadrouille cambodgienne. Ola générale ! Donc après une pause salvatrice dans une buvette sous les arbres, on se met en route pour la visite du Messi des temples ! Car comme je l’ai déjà rabâché x fois, Angkor Vat est bel et bien le temple le plus connu et le plus emblématique d’Angkor. Et ça se justifie du fait qu’il est le mieux conservé, mais surtout, qu’il est le plus grand ! Le plus grand d’Angkor, oui, mais aussi et surtout le plus grand monument religieux jamais bâti dans tout l’univers intersidéral.. Ce temple est tellement colossal par tant d’aspects, que s’en est presque difficile à concevoir. Trente-sept ans seulement, cinq millions de blocs de pierres, trois cent mille hommes et pas moins de six mille éléphants ont été nécessaires pour construire cet édifice au douzième siècle. Symbole du Cambodge, expression suprême du génie khmer, il est ce que le Machu Picchu est au Pérou. Ce que le Taj Mahal est à l’Inde. Ce que Woinic est aux Ardennes, pour te donner une idée de l’importance du truc de ouf !

 

Le temple représente pour certains le paradis sur terre. Pour d’autres, il s’agit d’une reproduction du mont Meru, considéré comme le centre du monde et demeure de Shiva. Euh… Shiva, c’est le dieu hindou, pas l’enseigne des femmes de ménage, hein ! Quant aux douves et aux murailles qui l’entourent, elles symbolisent les mers et chaînes de montagne que les pèlerins ont à franchir pour atteindre ce lieu sacré…

 

Après avoir compté les dodos, nous franchissons donc courageusement les mers, nous bravons donc vaillamment les chaînes de montagnes, et nous voilà enfin face à ce mastodonte. Quelques photos classiques avec le reflet sur les petits étangs et nous empruntons la large et majestueuse allée de pierre qui nous invite à pénétrer dans les enceintes successives sous le regard inquisiteur de lions et serpents géants, gardiens de ce sanctuaire. Déjà, je constate que la stratégie de faire passer les chinois avant nous est gagnante. Nous sommes presque seuls. Ensuite, ben comme je m’y attendais, c’est bien plus grand que mon premier appart’ ! On s’imagine ce temple avec des toits couverts de dorures et les murs tout de blanc vêtu comme le retranscrivent les historiens. Mais on s’imagine surtout l’immense ville qui se trouvait tout autour. Car tiens-toi bien à tes accoudoirs molletonnés, Angkor Vat n’était pas seulement le temple le plus imposant au monde, il était aussi le cœur de la ville la plus grande au monde de l’ère préindustrielle. Près d’un million d’habitants là où il n’y en avait par exemple que cinquante mille à Londres au même moment… Angkor Vat signifie d’ailleurs littéralement « La ville qui est un temple ».

Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?

Bref, on fait le tour de la coursive intérieure, on emprunte les galeries, et on essaie de s’imaginer ce que devait être la vie, ici, sans Thomas Edison et son électricité, sans Uber Eats et ses livraisons à domicile, sans Eve Angeli et son dernier album… Et j’ajouterai même, sans escalator ! Car pour grimper à l’étage supérieur, les visiteurs devaient réaliser une sacrée performance en empruntant un escalier à plus de soixante-dix pour cent de pente. Désormais, un escalier en bois avec rampe est mis à disposition des touristes moins aventureux. Petits joueurs que nous sommes… Là non plus, accès interdit pour ma pauvre Sasha…

 

Avant de sortir, on n’oublie pas la petite bénédiction par les moines bouddhistes. Et on n’oublie pas non plus d’aller jeter un œil à la bande-dessinée qui recouvre les huit-cents mètres de galerie extérieure. La galerie la plus célèbre pour ses « hiéroglyphes » est celle située à l’est. On y voit la fameuse scène du barattage de la mer de lait, grand récit mythologique hindou que je m’en vais te conter. Dieux et démons s’allièrent pour faire tourner une montagne en tirant tour à tour sur le corps d’un serpent géant à cinq têtes enroulé tout autour. Ils s’exécutèrent pendant mille ans afin de baratter la mer cosmique et produire l'élixir d'immortalité. Non, non, j’ai vérifié, ceux qui ont inventé cette histoire ne revenaient pas d’un séjour linguistique en Jamaïque !

Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?
Angkor what ?

Voilà, ça y est, tout a une fin à part bien sûr les saucisses qui en ont deux ! J'ai vu tous les temples qu'il faut absolument avoir vu à Angkor avant de mourir et bon sang de bonsoir, que c’est compliqué de mettre des mots pour faire un bilan d’un truc pareil, là où la langue française n’en propose que cent mille. Ajoute à ça que normalement, tu n’en connais que vingt mille, voir même… que vingt-deux et demi si tu mattes les émissions débiles sur NRJ 12. Bref, on a vu des temples millénaires. Des temples recouverts par la végétation, d’autres s’élevant fièrement vers le ciel. D’autres encore avec des escaliers très raides. Certains qui sont rénovés, d’autres complètement en ruines. Certains qui sont envahis par les chinois, d’autres où nous étions complètement seuls. Il y a eu les grandes stars, les oubliés, les méconnus. Ceux où l’on s’est perdu et ceux où l’on a suivi un chemin bien balisé. Mais dans tous ces temples, un point commun : Le bonheur de déambuler dans cette page de l’histoire de notre monde… Ça te convient comme conclusion ? Non ?... Ah ok, toi tu veux un classement de mes temples préférés, c'est ça ? Ok, sans prendre en compte le stade Vélodrome qui est un temple hors compétition, je dirais donc, dans l'ordre, Ta Prohm, Beng Mealea, Bayon, Banteay Kdei, Angkor Vat et enfin, Preah Khan ! Voilà, je peux rentrer en France le cœur léger ! Enfin, non, je crois qu’on va rester encore un peu pour aller se tremper les doigts de pieds dans la mer !

 

Sauf que la mer, elle est au sud ! Et que nous, nous sommes au nord ! Vite, un bus !!! Bon, pas de panique, notre bus de nuit ne partira qu’à vingt heures trente. Un bus de nuit avec de vrais lits, de vrais draps, de vrais oreillers comme à la maison ! Oui oui, ça existe au Cambodge ! Pour vingt-six dollars par personne, on a en effet droit à un bus direct jusqu’à Sihanoukville avec lits individuels, eau et collations fournies. La pub est alléchante ! J’achète ! Je te dirai si ça valait tant le coup que ça demain en arrivant. De toute façon, demain est une autre aventure…

Angkor what ?
Angkor what ?
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